Avant toute chose, je ne suis pas prof de Tantra, je ne me considère d'aucun courant particulier (Bouddhiste, Shivaïste, Shaktiste...), je n'ai pas non plus 30 ans de pratique derrière moi.
Ce que je partage sur ce site est avant tout ma vision personnelle.
On peut faire autant de recherches possibles, s'instruire, aller à la rencontre d'autres cultures, d'autres points de vue... ce qu'on en retire, ce qu'on en conclue ne reste qu'un autoportrait.
Si on s'est laissé toucher, il révèle toujours des changements lorsqu'on le compare aux autoportraits datant d'avant ce voyage. On évolue, constamment, mais il ne reste qu'un reflet de ce que l'on est.
Toutes ces pratiques nous amènent à nous rencontrer, nous découvrir, nous dévoiler... Il serait arrogant de croire que l'on va percer le secret de l'Univers, comprendre parfaitement une culture, une tradition -ici, le Tantra.
On ne perce que les voiles ombragés de notre propre identité, on fait notre tambouille. La pratique nous amène à mettre en lumière notre structure, ses faces cachées et multidimensionnelles, puis on se saisit de la pratique pour la faire passer à travers les rouages et les filtres de ce que nous sommes. Le Tantra passe d'enseignant à enseigné. L'ego sourit et s'enorgueillit : « j'ai compris ! Attend, je t'explique, ce n'est pas ça, tu as mal interprété. »
Mais comment retransmettre l'immensité de ce qui Est en la faisant passer par le prisme de ce que nous avons découvert de nous-même ?
Nous ne sommes que des machines à café améliorées, que peut-il bien rester de l'Univers une fois qu'une infime portion de ce qu'il Est est passée à travers notre filtre personnalisé pour finir dans un fond de tasse.
Que servons-nous aux autres ?
Un concentré de nous-même comme s'il était l'entière Réalité.
Le terme « facilitateur » apparaît de plus en plus et je l'apprécie beaucoup. Il existe ces rôles à endosser, afin de faciliter pour l'autre, sa rencontre avec lui-même sa rencontre avec le Divin, avec l'Univers, avec ce qui prend forme et le regarde à son tour lorsqu'il se penche au dessus du Néant en quête de réponse.
(Je ne me considère pas non plus comme l'une d'entre eux.)
Il me semblait important de revenir sur ce point.
J'entends beaucoup parler de non dualité, de la part de pratiquants de néo Tantra qui soulignent très justement que le Tantra (les Tantras ?) est une voie non duelle (le plus souvent) et que faire une distinction entre les pratiques revient à s'enfermer dans un prisme ignorant et hypocrite. Quelque soit la pratique, le courant, l'expérience, on invite simplement à se laisser traverser par le divin, à ressentir la « toile », l'interconnexion, l'absence de séparation entre Soi et l'autre, qu'au final il n'y a ni Soi ni Autre.
C'est très vrai à mon sens.
Mais cela ne doit pas devenir une belle histoire que l'on se raconte. L'important, quoi que l'on pratique, est de faire preuve d'honnêteté.
Si l'on grossit le tableau :
-Le danger du néo Tantra serait de se raconter que l'on est dans la recherche du divin, du sacré, alors que l'on veut juste jouir et profiter de l'encouragement des comportements « transgressifs » pour apaiser temporairement au lieu de "guérir" ce qui est blessé en soi.
-Le danger du Tantra Traditionnel est de partir en recherche du divin, de l’Éveil, du Sacré, et se perdre dans l’Extrémisme des ascèses et pratiques, devenir un « fanatique » dans toutes nos expériences, les passant par le mental et les transformant en gonflette pour Ego spirituel. Pourquoi la plupart des Tantrikas traditionnels ont une certaines formes de rejet envers le Néo Tantra ? De ce que j'ai pu constater par mes rencontres et expérimenter moi-même, il y a plusieurs raisons.
Déjà, prendre le Tantra, le passer dans une cafetière pour n'en ressortir que des méditations modernes, des massages, des modules impliquant la nudité, le toucher, la rencontre avec le genre opposé... bien sûr, c'est très confrontant et remuant, mais ça se résume un peu à garder l'agréable du plan horizontal et retirer tous les efforts même les plus importants et sensés qui amènent à une verticalité.
Quelqu'un qui se sent d'aller « chercher le sacré » dans des massages naturistes ou des pratiques frottis frottas, mais qui ne se sent pas de le faire sur un tapis de yoga, en méditation, dans le jeûne, ou dans une quelconque ascèse... il peut être compréhensible qu'on se demande si c'est bien le « sacré » qu'il cherche.
Il ne s'agit pas pour autant de vénérer le principe du « tu ne mérites pas le divin si tu ne te flagelles pas ou ne sacrifie pas tous tes conforts », nous en sommes très loin.
Ensuite, ces stages sont souvent un capharnaüm d'énergies, où tout le monde ramène ses bagages, ses envies, ses désirs, ses projections, ses blessures...
Je parle souvent de la nécessité d'avoir une structure encadrante carrée, et un contrôle de l'énergie ! Une retraite de Tantra traditionnel va brasser des énergies de toutes sortes mais celles-ci vont être systématiquement tirées vers le haut, sublimées, raffinées et montées en fréquences vibratoires, consciemment, par tous les participants et par les encadrants. Toutes les blessures, impuretés, toutes les « déviances » vont se faire happer par cet ascenseur énergétique qui les soumet à un processus de transmutation alchimique automatique. Ce n'est pas le cas dans un stage Néo Tantrique.
Tout le monde déverse ce qu'il est au milieu du groupe, ça brasse pendant 4/5 jours, et toutes les expériences relèvent d'un jeté de dés aléatoire au milieu d'un plateau de jeu en pot pourri. Vous avez une chance sur mille d'avoir la sensation d'être traversé par le « divin », de vivre une expérience incroyable et sacrée, et tout le reste peut laisser une sensation mitigée, un arrière goût désagréable, ou au mieux fade, voire être d'une grande violence. Les effets positifs ne viendront pas vraiment du stage mais de ce que vous en ferez derrière.
Dans le cas où vous rencontreriez le divin ainsi, l'absence de contrôle, de technique, de maîtrise... impliquera que vous serez simplement traversé puis laissé avec un vide car vous n'aurez pas la moindre idée de ce qu'il se sera passé, du comment, du pourquoi, et il vous sera impossible de vous élever de nouveau à ces fréquences vibratoires par choix.
Oui, mais, me direz-vous, il s'agit de toute façon de se laisser traverser et ne pas s'attacher. Ni au sacré, ni à l'expérience, ni à la sensation...
Certes.
De nouveau, il s'agit d'être honnête sur ce que l'on cherche. Si c'est être un simple réceptacle qui se remplit et se vide de tout ce qui est expérimenté, les projections des uns, les « poubelles » des autres, la sexualité « primale » aux basses fréquences, et parfois, qui sait, pendant une fraction de seconde, le Divin... cette approche peut être adéquate.
Si vous voulez être un réceptacle mais faire le tri dans ce que vous accueillez, dans ce qui vous traverse, et dans ce que vous rayonnez (et donc, attirez, manifestez dans votre vie)... une approche plus traditionnelle, avec ses pratiques, peut être plus sensée.
Dans le traditionnel, il y a un équilibre à avoir entre la maîtrise et le lâcher prise. Je ne prétends pas que le contrôle vous amènera à l'éveil. « Rien » ne vous amènera à l’Éveil. Il s'agit bien là de mon avis personnel. Ni le Tantra, ni le néo Tantra, ni une quelconque pratique ne vous y amènera.
Mais je ne parle pas d’Éveil, ici.
Je parle d'expérience du Divin, du sacré.
Mes quelques rares expériences que je qualifierais de « rencontre avec le Divin » (et que certains considéreraient peut-être comme superficielles), je les ai moi-même vécue en dehors de tout contexte particulier, en dehors de toute recherche. Ni en module de stage, ni en méditation, ni en pratique yogique. Simplement en vaquant à mes occupations professionnelles, en me reposant sur mon canapé après une séance se sport, en essayant de dormir ou en buvant un café pour clôturer un déjeuner.
Le divin n'est pas réservé à une élite, il est à la portée de vous et moi, car il est vous et moi, sans distinction.
Certains parleront de stages néo tantriques où la nudité est peu présente, où l'on va à la rencontre de l'autre et de Soi par le cœur, avec des exercices à deux, du yoga et des méditations.
Cela me semble une très bonne option ! Je ne doute pas que l'on puisse y vivre de très beaux moments et en ressortir grandi. Mais -et de nouveau il s'agit de mon avis personnel- pourquoi irais-je vers des méditations et pratiques "modernes", adaptées par des gens comme vous et moi, si je peux accéder à des pratiques traditionnelles et rituels confectionnés par des Yogis en état de Samadhi avec une totale vision et un contrôle précis de ce qu'ils proposent, guident, et entraînent en effet domino dans une multidimensionnalité que nous ne percevons pas à nos niveaux ? Pourquoi choisir le fond de tasse d'une cafetière qui me ressemble si je peux goûter au fond de tasse d’une cafetière quasi éveillée.
Avec tout le respect que je dois à chacun.
L'avantage principal du Tantra traditionnel, en fait, c'est la possibilité de ramener la « discipline » dans le quotidien. Ces états de bien-être que l'on peut toucher en stage (traditionnel, non traditionnel, peu importe), laissent bien souvent un vide. Revenir à sa vie est difficile, et on développe ce besoin de consommer les stages, de reprendre un shoot, pour combler le manque.
Vous ne pouvez difficilement ramener le stage de néo tantra dans votre vie individuelle de tous les jours. Vous pouvez mêler les pratiques et les connaissances du Tantra à votre hygiène de vie pour recontacter ce bien-être et ces hautes fréquences au quotidien.
Quelque soit notre voie d'expérimentation, ne perdons juste pas de vue l'honnêteté. Que recherchons-nous ? Dans quel but faisons-nous telle ou telle chose ? Et quel respect avons-nous pour le cheminement différent du voisin ?
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